Entretien

Publié le 28/07/2023

Entretien avec Marie Aubelle, éditrice Harry Potter chez Gallimard Jeunesse

Marie Aubelle est éditrice au sein de Gallimard Jeunesse et elle a fait partie de l’équipe qui a donné vie à Harry Potter. Aujourd’hui, elle nous raconte cette aventure magique !

«  Il y a vingt-cinq ans, je travaillais (déjà !) chez Gallimard Jeunesse dans le département Littérature dont s’occupaient alors Laurence Victor-Pujebet et Jean-Robert Gaillot, sous la direction de Christine Baker. Il n’y avait pas d’Internet et le fax était le canal principal qui nous reliait outre-Manche. Nous déroulions ainsi, de retour de week-end, des rouleaux de scribe où Christine nous faisait part de découvertes anglo-saxonnes enthousiasmantes. Elle avait justement lu un livre qui avait vraiment du potentiel. Résumons hâtivement : orphelin – pensionnat – sorciers – fantaisie – inventivité – amitié – roman d’apprentissage. On le publierait à l’automne, dans la collection Folio Junior, ce serait le n° 899. Je l’aimais vraiment beaucoup. C’était un Folio Junior archétypal. À la fois très classique, délicieusement british, “really charming” et très original. Sans doute parce qu’il demeure auréolé de fraîcheur, de simplicité, ce premier tome restera à jamais mon préféré.

 

« Contrairement à d’autres pays qui avaient des équipes de traducteurs,
Jean-François Ménard était seul dans l’aventure, travaillant dix heures par jour.»

 

Son titre de travail provisoire était Harry Potter et la pierre philosophale - traduction littérale de l’anglais. Il y eut quelques hésitations sur la nécessité ou non de franciser le nom du personnage principal : Henri Pottier, un temps évoqué, avec humour sans doute, car le traducteur, Jean-François Ménard, n’en manque pas, fut écarté. L’école des sorciers convoquerait peut-être davantage de lecteurs. Jean-Claude Götting travaillerait sur l’illustration de couverture. Je fis corriger le texte. Le livre parut à l’automne 1998 en France, on lui fit très bon accueil d’emblée. Nous publierions la suite dès la rentrée suivante, Harry Potter et la Chambre des Secrets. Le troisième volume serait lui retenu comme l’un des titres phares de la dizaine de titres emblématiques de la collection Folio Junior pour l’an 2000 à côté du Petit Prince, Zazie dans le métroHarry Potter et la Coupe de Feu allait marquer un tournant et rien, jamais, ne serait plus pareil. Il sortirait en grand format, comme Les Royaumes du Nord, de Philip Pullman. La date de sortie serait mondiale. À minuit, le jour J, les librairies lèveraient le rideau. Dès lors, pour le traducteur, un rétroplanning très serré fut établi. Contrairement à d’autres pays qui avaient des équipes de traducteurs, Jean-François Ménard était seul dans l’aventure, travaillant dix heures par jour. Pendant plus de dix ans, il vint chez Gallimard Jeunesse, avec Diane, sa femme, elle aussi traductrice, au terme d’un été intense, remettre sa traduction. Il pouvait alors enfin partir en vacances. Cette année-là, en 2000, il y eut une grande fête chez Gallimard. »

 

Marie Aubelle

Éditrice chez Gallimard Jeunesse

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