Chronique

Publié le 21/03/2019

Préparez-vous à sortir de votre zone de confort

Killer Game - Stephanie Perkins

Vous avez adoré découvrir Anna et le French Kiss et Lola et le garçon d’à côté ? Dans Killer Game, Stephanie Perkins fait le pari de sortir ses lecteurs de leur zone de confort, en mêlant, d’une main de maître, la romance à l’horreur.

« Makani pensait avoir assez souffert – elle avait perdu tout ce qui comptait pour elle à Hawaï –, mais le cycle karmique de la vie venait de compléter sa boucle pour lui infliger un ultime châtiment. »

Commençons par planter le décor : il y a un an, Makani quittait l’île de Hawaï pour aller vivre chez sa grand-mère au caractère bien trempé, à Osborne, petite ville sans histoire du Nebraska. Adieu plages de sable blanc et cuisine épicée. Désormais, le quotidien de Makani se résume à des champs de maïs qui s’étendent à perte de vue et à un réseau téléphonique aussi médiocre qu’au fin fond de l’Alaska.

«  Ses parents étaient en plein divorce, et ça se passait mal. Ils l’avaient envoyée chez sa grand-mère pour lui offrir un semblant de normalité. De normalité. Avec sa grand-mère. Au milieu de nulle part. »

 On est d’accord, ce n’est pas le cadre de vie rêvé pour une adolescente. Heureusement, Makani peut compter sur le soutien de ses nouveaux amis, Alex et Darby, qui se connaissent depuis leur enfance. Seule ombre au tableau : parfois, Makani se sent un peu comme la cinquième roue du carrosse. Et dans ces moments-là, elle se surprend à suivre du regard Ollie, un garçon solitaire, peu bavard et réservé, qui aime briser les codes – en témoigne sa ravageuse teinture rose, au centre de toutes les conversations, à égalité avec le récent meurtre d’une lycéenne.

« Ici, un mec avec les cheveux roses, c’est aussi scandaleux que la mort d’une étudiante appréciée de tout le monde. »

Lorsque les meurtres se multiplient, Makani et ses amis comprennent que personne n’est vraiment à l’abri. La ville se transforme en terrain de chasse et tandis que les médias s’emparent de l’affaire avec avidité, la jeune fille craint que le secret qu’elle cache depuis une longue année éclate au grand jour. Oui, tout compte fait, Osborne n’est peut-être pas une ville si tranquille que ça, et chacun y va de sa petite hypothèse pour essayer de découvrir l’identité de l’assassin qui courre les rues. Certains lycéens pointent même du doigt Ollie, mais Makani refuse d’y croire.

« Écoute, il y a un tueur en liberté, et on ne sait pas qui c’est, ni où il se trouve. Ni même si c’est bien un “il”. Ce qui signifie que toi et tes fesses, vous devez être là où vous êtes censés être – à n’importe quel moment du jour ou de la nuit. »

Tous les ingrédients sont réunis pour faire de votre lecture un moment inoubliable : des personnages principaux qui rompent avec les stéréotypes, dont on apprécie le caractère fouillé, les forces mais aussi les faiblesses ; une romance poignante et juste qui ne tombe jamais dans le cliché de l’histoire d’amour mielleuse ; des scènes résolument drôles qui marquent les esprits ; une menace à laquelle personne ne semble pouvoir échapper, pas même Makani et ses amis. À travers sa plume, l’auteure nous transmet avec talent toute une palette d’émotions. Tour à tour, on rit, on s’attendrit, on frissonne de peur.

« Elle n’avait aucune envie de parler à la police. De répondre à leurs questions. Et s’ils fouillaient dans son dossier ? S’ils découvraient qu’elle avait été expulsée de son ancien lycée, à Hawaï ? Elle avait toujours redouté le jour où ça finirait par se produire, et ce jour était arrivé. Qu’est-ce que ses amis allaient penser d’elle ? »

Killer Game porte aussi de nombreux messages : nous commettons tous des erreurs, mais celles-ci ne nous définissent pas forcément. Il faut savoir se pardonner, affronter la vérité et tirer des leçons de nos faux pas pour, enfin, aller de l’avant. Véritable bouffée d’oxygène, cette lecture nous sort bel et bien de notre zone de confort : pari réussi pour Stephanie Perkins !

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